Pensons le monde d’après crise autrement

Publié par Tom Peter, le 8 juillet 2020   1.1k

PETER Tom - THOMAS Adam

04/06/2020


Contexte d’urgence sanitaire, une aubaine pour l’environnement ?


Nous venons de sortir d’une période de confinement éprouvante faisant suite à une crise sanitaire que personne n’envisageait d’une telle ampleur. Certains optimistes y ont pourtant vu une opportunité pour l’environnement. Néanmoins, les bonnes nouvelles annoncées par les écologistes ne sont en réalité qu’éphémères. L’heure n’est plus à la réjouissance environnementale, mais à la crainte d’un retour à la croissance. Vous en doutez ? Regardez l’exemple de la Chine dont la pollution retrouve et même surpasse son amplitude passée. C’est ce qu’on appelle l’effet rebond. Il ne tarde désormais que ce même phénomène se propage dans le reste du monde annulant ainsi tous les bienfaits du confinement sur l’environnement. L’industrie lourde se prépare à repartir de plus belle, mais pourtant, une transition énergétique s’impose à l’humanité. On assiste désormais à un déséquilibre entre une offre abondante et une demande en déperdition. En effet, la consommation de pétrole a chuté drastiquement et de façon irréversible. Cette surproduction entraîne même des prix négatifs du baril. Toutes ces problématiques ne sont évidemment pas inconnues du gouvernement. Mais ses premiers agissements laissent à penser que le vrai problème n’est pas bien compris.


Des mesures gouvernementales judicieuses ? 

A première vue, la prise de conscience écologique est réelle. Il suffit de voir les 20 millions d’euros investis par le gouvernement français pour faciliter la pratique du vélo. En prenant du recul, une telle somme est dérisoire comparée aux réelles préoccupations de l’état. En effet, ce n’est rien à côté des milliards d’euros investis pour relancer l’industrie automobile et aéronautique. L’état serait-il sujet au greenwashing quand il nous présente sa croissance verte ? Le gouvernement a promis d’investir 120 milliards d’euros dans l’éolien ou dans le photovoltaïque. Pourtant, une efficacité variable due aux aléas climatiques, une fabrication polluante et une tendance à l’importation non propice à l’emploi laissent imaginer des propositions d’investissement plus cohérentes. L’engagement dans le renouvelable a montré ses limites. Il est temps de se réorienter rapidement vers des choix stratégiques plus judicieux.


Unissons nous vers un changement de modèle


Le gouvernement devrait vouer son revirement de politique à une consommation amoindrie. Multiplions des petites voitures, bien moins énergivores, qui réduisent indéniablement la consommation d’hydrocarbure. Choisissons le vélo électrique idéal pour effectuer des déplacements de courte distance. Arrêtons de diaboliser les centrales nucléaires alors que les énergies renouvelables ne font qu’empirer les émissions de CO2. Jean-Marc Jancovici,  ingénieur consultant en énergie, enseignant à Mines ParisTech et président du think tank The Shift Project nous éclaire sur ce point lorsqu’il affirme qu’ « il faut dépenser plus de CO2 pour faire le panneau que pour faire de la centrale nucléaire. En fait, on peut même perdre quand on remplace par du photovoltaïque ». L’efficacité d’un nouveau modèle se base uniquement sur une baisse de la consommation. Une autre solution, plus drastique, serait la décroissance économique qui viserait à réduire l’activité de certains secteurs non indispensables et donc de réduire les émissions de CO2 qui en découlent. Cependant, ce retour en arrière aurait des conséquences sur le revenu des plus faibles ce qui diminuerait leur qualité de vie. Ainsi, pour gérer la décroissance sans altérer le niveau de vie global, il faudrait développer un nouveau système économique basé non plus sur la croissance mais sur le respect de l’environnement et la régulation du besoin des ressources naturelles. En s’obstinant à faire perpétuer notre croissance contemporaine après la crise, l’écologie sera forcément mise au second plan. Nous devons nous y opposer. Néanmoins, le monde est-il prêt à un tel changement ? Dans le cas contraire, la décroissance serait subie et non pas organisée de plein gré. Cette situation engendrerait de terribles conséquences écologiques d’abord puis économiques qui toucherait les plus précaires. Il est alors important de planifier la décroissance pour préserver la vie de millions de personne. Les périodes de crise à l’image de la crise de 1929, la Seconde Guerre Mondiale, ou plus récemment la crise des Subprimes en 2008, sont là pour nous le rappeler. Elles nous forcent à réduire radicalement nos émissions. C’est dans ces situations que l’on voit les limites de notre système et nous force à le repenser. Comment accepter un système respectueux de l’environnement seulement sous la contrainte, seulement dans ses heures les plus sombres ? 


Fondons notre société nouvelle sur des valeurs collectives


 La propagation du risque infectieux a restauré une conscience collective quelque peu altérée par le capitalisme. En effet, jamais les Hommes n’ont autant oeuvré pour le rétablissement des liens collectifs qu’en période de confinement. Une période noire de l’histoire comme cette crise que nous traversons a peut être enfin rappelé à l’individu sa relation d’interdépendance avec les autres. C’est un soupçon d’espoir pour les enjeux écologiques et sociaux du XXIème siècle. Allons plus loin en prétendant qu’il s’agit là d’un point de départ sur lequel fonder une société nouvelle basée sur la solidarité, la volonté d’avancer ensemble.


Références

 

1 - Direction Régionale de l’Environnement de l’Aménagement et du Logement des Pays de la Loire, mai 2020, Sortie du confinement : Un plan de 20 millions d'euros pour faciliter la pratique du vélo

2 - Reporterre, Marie Astier, Avril 2020,  La chute des prix du pétrole rappelle l'urgence de la transition énergétique

3 - Haut Conseil pour le Climat (HCC), Avril 2020, Climat, santé: mieux prévenir, mieux guérir

4 - Youmatter.world, Clément Fournier, Mars 2020, Coronavirus et écologie : les leçons à tirer de la crise

5 - Usine Nouvelle, Aurélie Barbaux, Mai 2020,  Intégrer le climat à la sortie de crise... ou pas - Climat

6 - Reporterre, Gaspard d’Allens, Mars 2020, Pour le climat, il y aura « un avant et un après coronavirus »

7 - Reporterre, Mai 2020 En Chine, la pollution est plus forte qu'avant le confinement

8 - Dominique Strauss - Kahn, Avril 2020 L'être, l'avoir et le pouvoir dans la crise

9 - France Culture, Jean-Marc Jancovici, Mai 2020,  Jean-Marc Jancovici : "Nous nous dirigeons vers un monde où nous aurons moins de moyens pour plus de problèmes"

10 - Visuel principal : Dessin de Falco, Cuba 


Cette production a été réalisée dans le cadre d'un atelier d'écriture CONFINEMENT, et APRÈS ? lors du module Liberal Arts 2020 / Mines Saint-Etienne.